Le projet COGENAIR

Etude pilote participative pour la co-construction d’un indicateur acoustique à points intégrant la gêne liée au bruit du trafic aérien

Bruitparif a lancé début 2025 la réalisation d’une étude pilote (étude COGENAIR) sur trois secteurs survolés en Île-de-France, en y associant à chaque fois une trentaine de riverains. Dans le cadre de cette étude, les participants sont amenés à s’exprimer sur leur perception du bruit et sur la gêne ressentie à court, moyen et plus long terme. Ce recueil de données de perception est accompagné de la réalisation de mesures acoustiques simultanées. Le projet bénéficie du soutien de l’ANSES dans le cadre de l’appel à projets de recherche sur la santé environnement et la santé au travail (ANSES-24-EST-243).

Contexte

La réglementation en vigueur relative au bruit des transports s’appuie sur des indicateurs acoustiques énergétiques qui traduisent mal les critères d’intensité et de répétitivité des pics de bruit notamment en lien avec les survols d’aéronefs ou les circulations ferroviaires. Le débat public autour de ces questions se cristallise donc souvent autour de la remise en cause de ces indicateurs jugés inaptes à traduire la gêne des populations et à suivre les évolutions, notamment dans un contexte d’augmentation du trafic. Bruitparif suggère de créer un compteur d’événements sonores à points, le Noise Point Counter (NPC) s’inspirant des indicateurs existants de type NAX mais en s’affranchissant de l’effet de seuil qui est un inconvénient à leur utilisation. Il s’agit de réaliser un décompte du nombre de pics de bruit en pondérant chaque pic en fonction du niveau de gêne instantanée qu’il est susceptible de générer chez les riverains et de l’agréger ensuite par périodes (jour, soir, nuit, jours ouvrables, week-end, différentes saisons de l’année…) en prenant en compte les différences de sensibilité selon les périodes. Pour avancer sur la faisabilité de développement d’un tel indicateur et conforter sa pertinence, l’étude COGENAIR propose de recueillir des informations relatives à la perception du bruit lié au trafic aérien sur trois secteurs survolés sélectionnés en Île-de-France, en y associant à chaque fois une trentaine de riverains. Les participants seront amenés à s’exprimer sur leur perception du bruit et sur la gêne ressentie à court, moyen et plus long terme. Leur perception sera mise en regard des niveaux de bruit par ailleurs mesurés dans l’environnement.

Objectif du projet COGENAIR

Le projet COGEN’AIR vise à réaliser une étude de faisabilité d’élaboration d’un nouvel indicateur de gêne liée au bruit du trafic aérien, de type compteur d’événements sonores à points, en associant les riverains de trois secteurs survolés en Île-de-France. Après la préparation du cadre de la contribution citoyenne à la co-construction de ce nouvel indicateur (sélection des sites, recrutement des participants), le recueil des données, mesures de bruit et données de perception fournies par les riverains volontaires, a débuté au printemps 2025 et se prolongera jusqu’à l’automne 2025. Les données recueillies devraient permettre de proposer une première méthode de calcul de l’indicateur de type compteur d’événements sonores à points. L’indicateur sera ensuite expérimenté en opérationnel sur le réseau de surveillance du bruit de Bruitparif et sa pertinence discutée par l’intermédiaire de focus groups organisés avec les participants à l’étude sur chacun des secteurs retenus. S’agissant d’une étude de faisabilité sur un nombre réduit de participants, la mise en œuvre de l’enquête sur le terrain permettra de déterminer si un tel protocole pourrait être utilisé à une échelle plus large afin de recueillir des résultats plus robustes d’un point de vue statistique et d’établir des recommandations pour améliorer et ajuster le protocole.

SELECTION DES SITES PILOTES

Trois sites pilotes ont été sélectionnés en Île-de-France au sein de secteurs bénéficiant d’une station permanente de mesure du bruit des aéronefs exploitée par Bruitparif depuis plusieurs années et répondant à des typologies d’exposition au bruit aérien variées.

À cet effet, les sites ont été recherchés à proximité de chacun des deux grands aéroports franciliens de Paris-Orly et de Paris-Charles de Gaulle (Paris-CDG) ainsi que de l’aérodrome Paris Saclay-Versailles (anciennement Toussus-le-Noble).

Ils ont été choisis de manière à disposer de sites soumis à des niveaux de bruit contrastés :

  • Un site moyennement exposé : survol par une centaine d’aéronefs par jour en moyenne avec une valeur de Lden comprise entre 45 et 50 dBA, soit légèrement au-dessus de la valeur recommandée par l’OMS ;
  • Un site assez fortement exposé : survol par environ deux cents aéronefs par jour en moyenne avec une valeur de Lden proche de la valeur limite réglementaire de 55 dBA ;
  • Un site très fortement exposé : survol par environ trois cents aéronefs par jour en moyenne avec une valeur de Lden autour de 60 dBA, nettement supérieure à la valeur limite réglementaire de 55 dBA.

Pour les sites retenus autour de Paris-CDG et de Paris-Orly, les sites survolés différemment en fonction des régimes de vent et présentant par ailleurs une dispersion significative des niveaux de bruit en fonction des survols. Ces critères de choix permettent d’avoir un maximum de variabilité, sur un même site, du bruit au survol (gêne instantanée) et des conditions d’exposition moyenne susceptibles d’influencer la gêne de court terme (niveau de bruit aérien, nombre et distribution des survols) selon les régimes de vent, les jours de la semaine et les différentes périodes de la journée (jour, soirée, nuit).

Bruitparif s’est assurée que le voisinage des sites retenus était peu exposé à d’autres sources de bruit que le trafic aérien. Les cartes stratégiques de bruit élaborées dans le cadre de la directive européenne 2002/49/CE ont utilisées dans ce cadre pour exclure les sites dont le voisinage est fortement exposé au bruit routier ou au bruit ferroviaire.

Un repérage a été réalisé sur le terrain afin de s’assurer qu’aucune situation particulière (chantier de construction à proximité par exemple) n’était susceptible de venir perturber le déroulement de l’étude.

Les trois sites sélectionnés sont :

  • Sucy-en-Brie (94) à proximité de l’aéroport d’Orly ;
  • Saint-Prix (95) à proximité de l’aéroport Paris-CDG ;
  • Magny les Hameaux, Villiers le Bâcle, Châteaufort (78/91) à proximité de l’aérodrome Paris Saclay-Versailles.

RECUEIL DE DONNEES

Le recueil de données est opéré selon 3 axes :

Axe 1. Un questionnaire général pour caractériser la gêne à long terme ressentie par les participants en lien avec leur exposition au bruit du trafic aérien. Ce questionnaire permet de recueillir des informations sur le profil du participant, sa situation personnelle et professionnelle, son logement, son appréciation de son quartier et de son environnement, ses habitudes de vie, la gêne liée au bruit en général et au bruit des avions en particulier, sa sensibilité individuelle au bruit et sa perception du transport aérien. Des mesures d’isolement acoustique sont prévues chez chaque participant.

Axe 2. Un tableau de bord pour recueillir quotidiennement des informations sur la gêne à court terme pendant une période de deux à trois semaines, identique pour tous les participants d'un même site, garantissant une évaluation de la gêne sur une période commune et dans les mêmes conditions de survol. Le tableau de bord est complété une fois par jour pour chaque période de la journée (jour, soir, nuit). Le participant indique s'il était présent ou non à son domicile et, le cas échéant, renseigne ses principales activités et les principales zones du domicile fréquentées (extérieur ou intérieur, fenêtres ouvertes ou fermées), le niveau moyen de gêne ressentie pendant la période par rapport au bruit du trafic aérien. Les observations et les niveaux de gêne ainsi recueillis seront ensuite comparés aux indicateurs de bruit du trafic aérien mesurés à la station de mesure la plus proche, ce qui permettra d'identifier précisément les événements liés au bruit des avions. Les participants seront par ailleurs munis d’exposimètres acoustiques individuels (aussi appelés dosimètres de bruit) pour évaluer leur exposition individuelle au bruit.

Axe 3. Des séances collectives d'évaluation, au cours desquelles les participants à l'étude, sur chaque site pilote, renseignent leur niveau de gêne instantanée lors de survols d'avions, dans des conditions d'exposition au bruit identiques (mêmes survols d'avions). La séance est organisée dans un espace extérieur situé à proximité immédiate de la station permanente de mesure du bruit exploitée par Bruitparif.

L’enquête de terrain a débuté en mai 2025 et se prolongera jusqu’à novembre 2025.

résultats attendus

Le principal résultat attendu de cette étude est de valider la faisabilité du développement d'un indicateur opérationnel, tel qu'un compteur d'événements sonores à points, permettant de mieux prendre en compte la variabilité de la gêne des riverains en fonction des conditions de trafic aérien et de la période de survol. L'indicateur proposé à l'issue du projet aura été ajusté et validé par les participants, eux-mêmes concernés par le bruit du trafic aérien. Cet indicateur pourra être déployé à titre expérimental par les observatoires du bruit et proposé aux gestionnaires d'aéroports. Il pourra ensuite être évalué de manière statistiquement plus robuste grâce à une étude à grande échelle sur différents aéroports, au niveau national ou européen. Les méthodes d'évaluation mises en œuvre dans le cadre du projet COGEN'AIR auront été suffisamment éprouvées sur le terrain pour être appliquées à plus grande échelle. En proposant un indicateur représentatif des nuisances liées au bruit du trafic aérien, élaboré en collaboration avec les riverains, l'étude COGEN'AIR fournira un outil opérationnel de suivi de l'impact des effets combinés de l'évolution du trafic aérien (nombre de survols et composition de la flotte), des modifications des procédures d'exploitation (par exemple, généralisation des descentes continues) et des éventuelles mesures complémentaires, telles que des restrictions d'exploitation, qui pourraient être mises en place sur certains aéroports, compte tenu des problèmes de bruit persistants.

Les résultats sont attendus pour la fin 2026.

Originalité

L'originalité de COGEN'AIR réside principalement dans quatre aspects :

  • - L'approche innovante et pragmatique consistant à proposer un compteur d'événements sonores à points.
  • La notation des survols d'avions, in situ et par les riverains concernés par la problématique, et la comparaison avec les mesures de bruit générées par les survols d'avions, afin d'évaluer la variabilité de la gêne instantanée causée par le bruit du trafic aérien.
  • La variabilité de la gêne à court terme en fonction des conditions de survol, de l'heure et du type de journée. La question de la gêne à court terme et de son évolution dans le temps a été peu explorée par les études scientifiques, la plupart se concentrant soit sur la gêne à long terme via des questionnaires standardisés [30], soit sur la gêne instantanée en conditions de laboratoire.
  • L'implication des riverains dans la co-construction et l'évaluation du nouvel indicateur, cette méthodologie n'ayant jamais été mise en œuvre en France. L'implication des associations en tant que parties prenantes facilitera la mobilisation des citoyens autour de ce projet.
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